L'Afrique et ces rencontres...

Publié le par helenlvdt

Voilà quelques jours que je n'ai pas écrit... ce n'est pas l'envie mais le temps qui manque... les journées sont trop courtes pour tout faire et absorber !

 

Site-Gouraf.jpgC'est avec joie que je suis allée sur le terrain de déminage vendredi matin. Le site est tout près de ziguinchor, dans la brousse. Nous voilà parti avec Christian, l'un des chefs des opérations, Seydou, l'adjoint et un journaliste en stage qui fait son mémoire sur le déminage accompagné de son caméraman.

 

Le premier panneau donne le ton !

Panneau qui date d'avant l'arrivée d'Handicap sur le secteur, la sensibilisation de la population aux dangers des mines a commencé il y a bien longtemps...

 

Gouraf est un tout petit village, enfonsé dans les terres. La zone déminée est le terrain se trouvant autour du "bois sacré", un arbre gigantesque où les sorciers du village font leurs offrandes... magie africaine ou coincidence, l'arbres est habitée par un nid d'abeille, aussi conséquent que le volume de l'arbre.

 Les démineurs sont déjà à l'oeuvre depuis 7h du matin, la chaleur oblige à adapter les horaires de travail.

Site-Gouraf--3-.jpg

 

Je les retrouve sur la zone de vie, c'est la pose casse-croute ! Heureuse de revoir l'ambiance qui reigne sur les zones de repos des sites de déminage, les sourires sont là, on blague, on chambre, la bonne humeur africaine siège, eux qui risques de mourir quelques minutes après, comme s'il voulait conjurer le sort...

 

Le caméraman ne connait pas son groupe sanguin, il lui est donc pas possible de venir avec nous sur le site. Je me propose de filmer à sa place, Seydou gèrera les photos.

 

Après habillage et topo sécurité, nous voilà parti, guidé par Kébé, chef de site.

Site-Gouraf--8-.jpg

 

Une des 2 équipes est repartie sur le chantier mais avant même nos 1ers pas, Kébé arrête les activités afin d'assurer la sécurité des visiteurs.

 

Caméra à la main, je chemine avec Seydou, loin derrière, prenant notre temps pour quelques palabres, à voix basse, le site est un double lieu de culte : le bois sacré et un ancien cimetière catholique.

Copie-de-Site-Gouraf--12-.jpg

 

 

La visite durera quelques heures, me laissant le temps de parler avec les démineurs et l'infirmier et d'apprendre à connaitre les nouveaux.

Venir sur le terrain, c'est aussi montrer que l'on s'interesse à leur travail, qu'on est à leur écoute et que l'on est pas que dans les bureaux. Je sais que ma venue ici leur permettra d'être plus en confiance dans l'avenir.

 

Retour au bureau "taftaf" (rapidement), avec détour par l'hôpital pour évaluer le temps nécessaire à une évacuation.

 

Sortie du boulot 16h, le ventre vide depuis 6h du matin, je suis lessivée.

 

Et c'est pas la douche que j'ai apprécié en rentrant, il n'y a toujours pas d'eau à la maison et des cafards de 4cm de long dans le bac à douche...

 

 

   Samedi matin, le voyage est programmé, je dois aller à Bignona, à 30kms de Ziguinchor, visiter le marabout.

Le voyage se fera avec Aliou, qui a bien voulu accepter de me suivre, les déplacements d'une blanche seule n'étant pas conseillés en ce moment.  

Nous nous retrouvons près de la gare routière, dans un bar, le macadam. Je fait là la rencontre de Gilles; en photo ci-dessous.

Gilles---Macadam.jpg

 

 Très sympa, répondant bien à son prénom mais vu comment il a rongé l'arbre, je me sens pas de faire plus amples conaissances !

 

Quelques mètres plus loin, la cohu de la gare routière nous attends, des dixaines de voitures, bus de toutes tailles, dans des états bien déplorables, des dixaines de personnes cherchant à partir ou arrivant, les pieds sur ce macadam noir de graisse et d'essence, les "talibé", enfants mendiants aux pieds nus et en guenilles, cherchant la générosité des voyageurs.

 

Aliou nous a trouvé une place de choix dans un taxi brousse en payant 200 CFA de plus, je suis devant à côté du chauffeur et Aliou derrière moi. Il faut savoir que les taxi brousse sont des taxi 7 places, des breaks emmenagés avec des sièges sur les essieux arrières, les places du fond sont difficiles à supporter.

 

Ma place est une chance, j'ai tout le confort pour mes guiboles mais une cibles pour les policiers qui ne manquent pas d'arrêter les taxi dès qu'ils voient la peau blanche... en effet, 10km plus loin, le seul contrôle d'identité est pour moi et seulement moi : "oui, madame, contrôle passeport, tu viens d'où, tu fais quoi, tu habite où....", je le savait, je l'avait déjà vécu et prévenu Aliou, qui rigole de ces dents blanches de voir l'insistance du policier.

Aliou me dit que le trafic de chanvre indien a augmenté et que les blancs sont dans le coup. Avec ça en plus, je sais que le contrôle du retour sera pour moi !

 

Arrivé à Bignona, nous decidons de marcher jusque chez Fatou, la femme de Téréma,un ami, enceinte de 8 mois. Je ramène pour elle de couches bébé récupérées en France. Les indications de Téréma ne nous ont pas guidées, nous avons marché 1h30 en plein soleil, il est 12h à notre arrivée chez fatou.... le temps de prendre un peu d'eau et rencontre avec Danfa, le marabout.

 

Danfa à 41ans, il est marabout de profession, c'est l'intitulé de sa carte d'identité.

Nous le retrouvons assis dans une petite pièce, où trône au centre des tas de bouteilles, peau de serpents, potions, poudres... J'ai ramené un cadeau à Danfa, un coran écrit en Arabe, Français et phonétique. Danfa sourit et le pose à côté de lui... oups, ça doit pas lui plaire !

Je sais qu'il est Tijian, une confrérie musulmane discrète et modérée, une confrérie que j'apprécie. C'est pour cette raison que je l'ai choisi, mon ancien marabout étant décédé.

 

Il est étrange pour un blanc d'aller voir un sorcier. Mais j'ai appris en vivant ici qu'il est des choses qui ne s'expliquent pas et qu'il n'est pas possible de vivre en Afrique sans la magie. Ici, on va voir le sorcier avant le médecin !

 

 

Dès le début Danfa me dit qu'il est heureux de me rencontrer. Peu de blancs ont fait le déplacements pour le voir. Pour lui, c'est un signe de reconnaissance mais aussi de respect et de coeur. Aliou fait la traduction, Danfa ne parle pas français.

Danfa sait déjà des choses sur moi, il a fait des prières et offrandes pour ma protection et a déjà interrogé les esprits sur mon avenir. Mais comme il le dit, ce n'est que des recommandations, moi seule prend les décisions.

 

En France, on va voir un psy, en Afrique, on va voir le marabout.

 

J'ai quelques questions à lui poser, Danfa me fait choisir des perles de son chapelet et récipe des paroles. Les marabout ont tous des façons différentes de procéder, mon ancien marabout regardait l'avenir dans les cauris, coquillages. Sans me connaitre, Danfa a toujours vu juste dans ces paroles. C'est pour cela aussi que je me permets de faire le déplacement.

Une fois de plus, il me donne ces conseils... je repartirai aujourd'hui avec une potion de lavage pour me protéger, je sais de qui, lui aussi. On verra si ça marche. Certaines de mes demandes seront vu plus tard, c'est lui qui doit travailler maintenant. Comme tout bon marabout, Danfa ne demande rien, on donne ce que l'on veut si les choses marchent. Si on est  pas satisfait, on ne donne pas. c'est la différence entre le charlatant et le professionel.

 

Aliou en profite pour lui poser quelques questions aussi.

 

Cette heure d'échange est un grand moment pour moi, j'avait tant espéré le rencontrer.

Il me précise qu'il reste toujours à ma disposition et me demande de l'appeler pour savoir si ça marche. J'avais quelques requêtes particulières, il souhaite connaitre les résultats.

Et lors de notre aurevoir, Danfa tiens le coran à la main et me dit "très bien, très très bien" avec quelques paroles en wolof. Aliou m'expliquera que c'est un cadeau rare que je lui ai offert, Danfa a le sourire jusqu'aux oreilles, j'en suis heureuse.

 

Nous repartons naze, petit aurevoir à Fatou et reprise d'un taxi dans l'autres sens. Le trajet du retour va être plus cahotique... 

Site-Gouraf--40-.jpg

 

C'est en taxi 7 places que nous repartons, les places sont moins biens, Aliou est derrière, moi au milieu.

 

Le chauffeur roulait tranquille jusqu'à ce qu'un autre taxi le dépasse.

Et là, ce fut l'orgie !

 

Le taximan s'est mis à accélérer, prenant les virages à une vitesse importante, impossible de voir combien, ça doit faire longtemps que le compteur ne fonctionne plus !

 

Une vieille femme à côté de moi me fait signe de m'éloigner de la porte et de me raprocher d'elle. Ah, il semble que je ne suis pas la seule à être inquiète !

Premier regard vers Aliou, puis un second et enfin les autres passagers commencent à râler... le chauffeur ralenti et s'excuse, Aliou m'expliquera que le 1er arrivé à la gare routière est les 1er reparti... ça donne pas le droit de nous tuer ! il arrivera pas en 1er comme ça !

 

Le Temps de manger un tiboudien à la gare, nous reprenons un taxi vers la maison, Aliou va aller travailler un peu, il a l'atelier juste dans le quartier. Aliou est luthier.

 

Arrivée dans ma rue, Matar est devant sa porte, il fait du thé.

Matar-et-le-the--10-.jpg

 

 

On est naze, le trajet a été fatiguant.... le thé arrive à pic !

 

Mais le thé ça prend des heures en Afrique et j'ai pas trop le temps, les toubabs de la mission d'Handicap viennent manger à ma maison ce soir, j'ai ramené du foie gras !

 

L'occasion pour moi d'emprunter un vélo à un copain de Matar et je pars au marché....

 

J'y rencontre Khady, une femme de 40 ans, elle a un super étale de légumes... quelques éhcnges, Khady est là tout les soirs, j'ai trouvé mon fournisseur.

 

Un coup de pédale et je suis devant la boutique de Maurs au coin de ma rue, un homme aux grands sourires, riant dès que je lui parle en wolof. C'est là que je vais faire mes courses depuis mon arrivée, on trouve de tout chez lui, de la farine au PQ !

 

J'ai fini par rendre le vélo, c'est costaud de pédaler dans le sable avec un pneu à demi dégonflé !

Et tout les gens que j'ai croisé me disait la même chose "eh toubab, vélo, vélo !"

 

Mais c'est en discutant avec le gardien que j'ai compris ! Tout le quartier m'a vu pédaler et pour eux, un blanc en vélo, c'est pas possible... car "c'est trop dur le vélo", me dit-il !

 

 

Il n'arrêtent pas de m'ettonner ces africains !

 

Publié dans Casamance Mai 2010

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H
<br /> En regardant le blog ce matin, je me dit que Gilles le singe me rapelle quelqu'un au boulot...<br /> <br /> <br />
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